Du 12 au 25 avril 2025, se tenait Preparing for free time, dans l’espace Doc! (Paris, XIXe). Proposée par l’artiste Ana Vega, cette installation vidéo et scénographique découpe l’espace d’exposition en zones, en emploi du temps, et présente des préoccupations et des recherches en cours, situées à l’intersection entre les problématiques liées aux conditions de travail artistiques et celles liées à la parentalité : « Depuis plusieurs années maintenant je m’intéresse à l’histoire de nos institutions du travail, et aux processus d’émergence de nouveaux droits. Les pièces que je présente parlent de dépendances pendantes, d’intermittence et de bras occupés. D’empilement de jobs et de rôles, de dissonances temporelles. De discipline de gestion du temps, de travail de maintenance. Des étranges frontières du travail et de l’amour. »

Ana m’avait proposé d’écrire un texte, qui allait devenir une pièce de l’exposition. Au fil des échanges et des discussions, c’est finalement une discussion avec la sociologue Maud Simonet qui a vu le jour, autour de son dernier ouvrage L’Imposture du travail, désandrocentrer le travail pour l’émanciper (Éditions 10/18, 2024).

Cet entretien prend la forme d’une pièce sonore d’une trentaine de minutes à deux voix et peut s’écouter au casque pendant la visite.

« Le travail gratuit, ce n’est pas juste un truc qu’on a fait et pour lequel on n’a pas été payé – mais sur lequel tout le monde s’accorde  pour dire que c’est du travail. Si on dit cela, on passe complètement à côté de leur leçon. Elles nous disent « méfions-nous des frontières du travail », « méfions-nous de la frontière entre ce qui est travail et ce qui ne l’est pas ». Cette frontière est politique, elle est un objet de lutte. En invisibilisant une partie des activités comme n’étant pas du travail, en disant « c’est autre chose », alors même que le capital s’en empare et se l’approprie, il y a une forme d’invisibilisation, et c’est là qu’opère la lutte. Le conflit n’est pas autour de l’étendue du travail. L’idée c’est pas d’augmenter la liste. L’enjeu n’est pas de déplacer la frontière, mais de récupérer le crayon qui la trace. »

Ce travail fait suite à l’écriture d’Aujourd’hui, on dit travailleur·se de l’art (Éditions 369, 2022) et à un premier entretien réalisé en 2018 avec Maud Simonet sur le travail gratuit pour la revue Panthère Première, « Le travail domestique est la matrice pour penser le travail gratuit« .